Des amis et des gestes dans la danse à deux
Quel merveilleux loisir que celui de la danse à deux. Le côté convivial et sportif pour tous les âges séduit la plupart des gens qui s’y adonnent. On peut tout aussi bien pratiquer d’autres sports et faire également des connaissances mais quel est donc le secret de la danse qui permet de se faire tant d’amis en si peu de temps ?
Prenons d’abord un exemple de rencontre habituel.
Vous allez dans un club de gym ou dans une association et faites la connaissance de quelques personnes. Parfois il vous faudra plusieurs rencontres avant de dire << bonjour >>. Vous serrerez la main et parfois vous ferez la bise mais regardez vous. Vous restez à une distance « respectueuse », vous tendez la main, vous vous penchez en avant pour faire la bise, bref vous laissez une distance entre vous et la personne que vous saluez. C’est la distance de sécurité, votre territoire. Lorsque vous discutez avec une personne inconnue vous établirez un espace d’environ un mètre et si la personne s’approche, vous allez avoir tendance à reculer pour maintenir cette distance. Si elle s’approche encore et que vous êtes « dos au mur », vous allez établir un signal lui signifiant » attention, on ne dépasse pas cette limite « . C’est ce que l’on appelle un signal barrière. Les bras croisés est un bon exemple. On parle plus difficilement à une personne qui a les bras croisés qu’à une autre qui les a derrière le dos. Ce n’est qu’au bout d’un temps parfois long et après avoir fait plus ample connaissance que vous aller permettre à ces personnes d’envahir progressivement un peu de votre territoire, d’accepter de diminuer votre distance de sécurité. Quant à vous laisser toucher, il n’y a que les amis intimes qui y sont autorisés.
Que penseriez-vous, mesdames, d’un homme qui vient de vous être présenté et qui vous demanderait
« Je peux vous tenir la main une minute ? » ou « Je peux vous prendre par la taille ? » …
Vous serez offusquée et choquée par de telles demandes car ce sont des signaux qui veulent dire, on se connaît, on est intime. Ce sont des signes qui veulent dire qu’il existe des liens entre vous. Ce n’est qu’en progressant dans l’intimité, que la femme et également l’homme, vont se laisser toucher des parties de leur corps de plus en plus étendues et intimes comme la tête, le cou, les jambes, le dos, le ventre, les zones de plus en plus « taboues ».
ET POURTANT, c’est ce qui se passe dans la danse. La société accepte que de parfaits étrangers transgressent les règles habituelles sans s’en offusquer , en les trouvant non seulement normales mais également ayant un caractère esthétique. Reprenons l’exemple.
Mesdames, vous êtes dans un dancing et repérez un bon danseur. Il s’approche de vous et vous invite. Vous ne le connaissez pas mais … vous acceptez l’invitation donc :
Vous allez accepter que la distance entre vous ne soit que de quelques millimètres (qu’il envahisse donc votre territoire), qu’il vous prenne par la main, qu’il pose l’autre main sur votre épaule ou dans le dos ou vous enlace la ceinture (qu’il établisse des signes liens). Certaines figures de la salsa se terminent par une caresse, etc. (qu’il touche des zones habituellement taboues). Et vous accepterez tous ces contacts avec le sourire au lèvres. De plus vous allez suivre votre cavalier, c’est à dire faire des gestes « en écho », semblables à ceux qu’il fait. Ces postures en écho (adopter une attitude similaire à celle de la personne à côté de vous) sont en général adoptées par des personnes intimes ou amies de très longue date.
Or, le comportement, les zones que les partenaires acceptent de se laisser toucher, les postures en écho sont les signes habituels de gens qui se connaissent depuis très longtemps et qui ont une confiance mutuelle. S’il vous fait bien danser, les amis diront même « Ils dansent bien, ils ont une certaine COMPLICITE entre eux » alors que vous ne vous êtes jamais vus auparavant. Tout ceci en quelques secondes, pour une durée de cinq minutes en moyenne et avec un parfait inconnu.
Ces contacts physiques acceptés induisent la mentalité qui va de pair, c’est à dire que le premier contact oral APRES la première danse, se fera avec un a priori favorable sauf si le danseur a outrepassé quelques règles que l’on verra plus loin. L’acceptation de partager son territoire crée la confiance car c’est un signe de confiance. L’acceptation de signes liens crée des liens affectifs, on va trouver son partenaire agréable. L’acceptation que certaines zones du corps habituellement taboues soient touchées crée une certaine intimité. Une amitié est née parfois en quelques minutes alors qu’il aurait fallu des heures ou plus de discussions dans un contexte différent. Il arrive même que l’amitié arrive sans que les danseurs ne se parlent parce qu’ils sont de nationalité différente ou tout simplement parce que les mots ne sont plus nécessaires. Et les partenaires se trouveront sympathiques sans avoir échangé une parole.
Que s’est-il passé lorsque les danseurs se séparent fâchés ? Si le cavalier n’est pas « à la hauteur » ou le couple n’a pas réussi à se synchroniser, le couple se sépare désolé mais en général pas fâché.
Bien souvent c’est parce que le cavalier n’a pas respecté certains gestes ou que ses gestes ont été mal interprétés, donc il n’avait pas à les faire. Exemples :
Etre collé serré dès la première danse ou sur certaines figures (territoire trop envahi, zones taboues en contact).
Contacts physiques sur des zones encore taboues pour une première danse ( cou, joue, tête, jambes, etc. )
Mais également homme comme femme :
Mauvaise haleine, odeurs fortes de tabac ou corporelles, paroles déplacées.
Comment éviter de se séparer fâchés ?
Pour les dernières raisons, une bonne hygiène est suffisante et pour les autres :
Cavaliers, laissez votre partenaire régler elle même la distance à laquelle elle veut danser et regardez la. Sa bouche, si elle ne sourit pas, mauvais signe, vérifiez la position de vos mains, les figures ne sont-elles pas trop compliquées pour son niveau ? etc. Si ses yeux s’agrandissent, ce que vous venez de faire juste à ce moment est probablement à éviter.
Cavalières, réglez votre distance de danse mais gardez en tête que si vous êtes à 50cm, le renversé portera bien son nom et vous allez vous retrouver étalée sur la piste et là, ce ne sera pas la faute du cavalier. La bonne distance est celle de l’épaisseur d’une feuille de papier. Bon j’exagère mais à peine. Mettons deux ou trois centimètre maximum. Si vous avez envie de danser collé serré, je ne connais pas de danseur qui le refuse. Si le danseur vous colle, mettez votre main gauche sur son épaule et poussez jusqu’à obtenir la bonne distance. Si cela ne suffit pas, main droite toujours sur l’épaule, placez votre coude droit entre vous et lui. Si insuffisant deux choses : Lui marcher sur les pieds ou le laisser planté au milieu de la piste. Idem pour les paroles déplacées, n’hésitez pas, laissez le planté sur la piste. Gestes sur des zones taboues. Votre cavalier n’a en vu que votre visage. Profitez-en pour lui passer des messages en faisant la moue, en fronçant des sourcils. Certains gestes du cavalier peuvent être involontaires, faites lui comprendre que vous n’avez pas apprécié mais que vous pardonnez (signaux contradictoires par exemple hochement de la tête pour le mécontentement mais demi sourire aux lèvres). Evitez d’être provocante par vos gestes, attitudes ou regards appuyés si vous ne désirez pas que votre cavalier devienne entreprenant.
Finissons par le côté positif, ce qu’il faut faire.
Messieurs, soyez attentifs aux signaux de votre partenaire. Les expressions du visage et les gestes parlent souvent plus que les mots. Par votre compréhension des signaux qu’elle vous envoie et le respect que vous lui témoignerez, votre partenaire aura de plus en plus confiance en vous et vous pourrez seulement alors vous autoriser des figures où vous entrez en contact avec sa tête, son cou, son visage (des zones taboues).
Mesdames, soyez expressive, votre cavalier a besoin de vos signes pour connaître votre état d’esprit, savoir si vous appréciez sa chorégraphie, son attitude à votre égard.
La plupart du temps, les gestes sont complémentaires à la parole mais deviennent le seul moyen d’expression lors d’une danse en couple. Les gestes et les expressions du visage sont très bien perçus par les individus même s’ils sont souvent décryptés d’une manière inconsciente. L’erreur d’interprétation est très rare donc recourez à ce mode d’expression en accentuant les traits car souvent on danse dans une semi pénombre avec des lumières virevoltantes de toutes les couleurs qui peuvent cacher par moments la vue complète du visage.
La danse est non seulement un sport, un loisir, mais le plus merveilleux des moyens pour se faire rapidement des amis où que ce soit dans le monde grâce aux gestes qui sont un « accélérateur » de la confiance par :
– Le rapprochement des corps (partage du territoire)
– Le contact physique (signes liens d’intimité)
– La complicité qui s’instaure entre les partenaires (signes en écho d’amitié de longue date)
Par José Maria – janvier 2003